samedi 8 juillet 2017

La Vie - Hanavaho



Il était une fois une petite fille qui était bien malheureuse.
Elle était malheureuse bien qu’elle recelait en elle une infinité de trésors : amour, amitié, tendresse, joie, disponibilité, écoute, don, partage. Rien dans sa vie ne semblait fonctionner comme elle l'avait souhaité.

Lorsqu’elle voulait parler, les mots qui sortaient de sa bouche étaient tels des épées ; cinglants, coupants, froissants, désagréables. Elle aurait tellement aimé pouvoir dire des belles et bonnes choses mais à chaque fois, elle devenait agressive, méchante parfois même violente. Personne ne l’aimait.

Elle voulait avoir des amis. Vivre toute seule, c'est tellement difficile...

Pourtant, elle donnait et se donnait aux autres sans compter. Elle avait essayé une multitude de choses : associations caritatives, clubs de sports, mouvements de jeunesse, travaux les plus divers, sans espoir. Au bout d’un moment, les autres, saturés, s’en allaient. Elle se retrouvait alors plus seule et encore plus désespérée qu’avant. D’échecs en échecs, sa vie se poursuivait.

Un jour, qu’elle avait un chagrin plus gros que les autres chagrins, elle s’installa sur un talus, un peu à l’écart de la ville. C'était un jour d'automne quand l'air est encore doux mais frissonne déjà un peu.

Un vieux monsieur qui jouait de l’orgue de barbarie vint à passer. Dès le premier regard, ce musicien des rues comprit qu’elle portait en elle à la fois un trésor et un fardeau. Comme il avait beaucoup souffert lui aussi dans sa vie d’errance, il se dit qu’il pourrait peut-être l’aider. Il s’approcha d’elle et lui demanda :
- Comment se fait-il que tu portes un si lourd fardeau ? Si tu le veux, je peux t’aider. Ne dit-on pas qu’une joie partagée est une double joie ; et qu’un chagrin partagé est un demi-chagrin ?

Elle esquissa un petit sourire mais ses yeux restaient tristes. Sans bien réfléchir, elle se mit à raconter à cet homme inconnu ses chagrins et ses espoirs, ses peurs et ses échecs. Elle parla longtemps, longtemps sans rien cacher, sans agressivité, ce qui ne lui était encore jamais arrivé.

L’homme ne disait rien. Il se contentait de sourire.

Elle raconta son enfance, sa vie présente et ses espoirs pour demain.

L’homme ne disait toujours rien et souriait toujours.

Après un long silence il prit la parole et lui dit :
- Le danger dans les relations avec les autres est d'avoir des attentes selon nos critères de ce que ça devrait être. Prendre des comportements pour des acquis. On a plus de chances d'être déçu si on a ce genre d'attente plutôt que de prendre chaque chose comme un petit "quelque chose" de positif à chaque fois... un petit soleil dans sa journée.... une grenouille dans un lac... une graine de sésame sur son big mac... un piment sur sa pizza... un grain de fromage dans sa poutine... du ketchup sur son pâté chinois... de la peinture de couleur dans son appartement... une augmentation sur son salaire... un gif sur une page web... un trèfle à 4 feuilles dans un gazon... un cheveu noir dans ses cheveux blancs...

Il était tard, il lui fallait rentrer.

Elle quitta l’inconnu sans avoir bien compris le sens de ses paroles mais elle y repensa souvent.

" Prendre chaque chose comme un cadeau, sans attendre rien d’autre ".

Ce n’était pas par hasard s’il s’était trouvé sur son chemin, car il n’y a pas de hasard. Il lui avait délivré un message qui allait changer le cours de son existence.

Je ne sais ce qu’il est advenu d’elle mais si vous la rencontrez, donnez-moi de ses nouvelles.

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